Avec Pop, Sophie Museur a réussi une entrée remarquée en littérature. Dans le cadre de la campagne « Lisez-vous le belge ? », #Liégeois / Liégeois Magazine vous emmène à la rencontre de cette passionnée d’images et de mots.
Originaire du Hainaut mais résidant à Bruxelles, Sophie Museur a débuté par le théâtre amateur à l’adolescence avant de se former à l’école LASSAAD à Saint-Gilles. Après un passage par le théâtre de rue, elle se tourne vers le jeune public qui est, depuis 30 ans, son cœur de métier. « Je m’y sens bien », sourit-elle. Comédienne, auteure et metteuse en scène de nombreux spectacles – pas forcément les siens –, elle obtient aussi le premier rôle, en 2004, dans Des plumes dans la tête, film de Thomas de Thier, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes.
« Le théâtre est un médium complexe auquel je préfère le terme spectacle car un spectacle, ce ne sont pas que des mots, ce sont d’abord des corps qui bougent, une notion architecturale avec ces silhouettes qui évoluent dans un décor, un jeu de lumières, une instantanéité avec le public et une forme d’art qui fait appel à différents sens », explique Sophie. « Ce qui en fait sa beauté, c’est tout cela, ce montage d’une série d’éléments pour mettre en jeu un propos. »
Cette sympathique quinquagénaire a rarement monté des spectacles avec du texte mais, paradoxalement, aime profondément les mots. « J’aime leur précision, l’usage du terme juste, la musicalité d’une phrase », confie-t-elle. « Avec l’écriture, on peut aller très loin, développer longuement son propos, son récit. C’est différent d’un spectacle, c’est un tout autre usage des mots. »
C’est finalement assez naturellement que cette Bruxelloise d’adoption a fini par boucler un premier roman remarqué. « L’écriture m’a toujours habitée, accompagnée. Mais je n’avais jamais pensé écrire un livre », reconnait-elle. « Je voulais écrire un spectacle selon le point de vue d’un enfant en dessous de la table. Tout est parti de cette intention… J’ai remarqué que j’avais beaucoup de choses à dire, de thématiques à explorer. L’écriture m’a emportée vers un ailleurs. »
Sa grande expérience de la scène a nourri le style qu’elle a adopté. « Ma manière d’écrire est influencée par mon habitude à construire des images. Ceux qui ont lu le livre évoquent la précision des descriptions, une certaine sensorialité. J’écris d’ailleurs en ayant des images, des sons et des musiques dans la tête », observe-t-elle.
C’était il y a dix ans que Sophie écrivit la première scène de ce qui sera Pop, avant de laisser ce texte en veille car il ne cadrait pas avec un spectacle. Au fil des années, cette maman de deux grands enfants accumule de la matière, d’autres scènes et finit par reprendre l’écriture. « J’ai écrit pendant un an et demi, deux ans. Cela ne m’a pas semblé long car je me suis beaucoup amusée et que je continuer à exercer mon métier à côté », détaille-t-elle. Pop fut accepté en août 2022 par Onlit Editions et publié un an plus tard, en septembre 2023. « J’étais très contente car j’ai mis trois ans à trouver un éditeur et j’ai beaucoup retravaillé ce texte. J’étais arrivée au bout de ce que je pouvais offrir à ce texte. »
Pop, c’est le nom d’une jeune fille qui grandit dans le Borinage dans les années 80, bercée par les tubes de Michael Jackson, entre le carnaval du village, les majorettes, les auto-scooters et le bistro où sa maman lève un peu trop le coude. Elle va découvrir l’amitié, l’impatience, la colère. Et l’amour. « Il y a une dimension autobiographique mais c’est indéniablement un roman. Aucune scène du livre n’a jamais existé totalement, je suis complètement partie dans le récit », précise Sophie qui considère sa création comme destinée aux adultes et aux grands adolescents.
Dans Pop, la désormais écrivaine aborde différents thèmes qui lui tiennent à cœur. « Ma première intention était de porter un regard objectif sur les mensonges et la lâcheté des adultes, par le biais d’un enfant qui observe ces contradictions. La majorité des fictions sur lequel le monde des adultes repose sont les certitudes et les peurs », analyse-t-elle. « C’est aussi une ode à la curiosité : ne pas avoir peur des questions, des rencontres, de l’autre, de l’étranger. »
Sophie y évoque aussi l’alcoolisme et la religion dans un monde qui peut paraître désuet mais pas complètement. « Pas grand-chose n’a changé sous le soleil », note-t-elle. « Et puis il y a ce fil de l’amour chez les enfants, lorsqu’ils découvrent ce sentiment important, fondateur. »
Sorti depuis près de deux mois, Pop a déjà valu à son auteure de jolies rencontres et des critiques élogieuses. « Le bébé est lancé, si je puis dire. Ce récit ne m’appartient plus, il est lancé dans le monde et va faire sa route, il m’échappe complètement », assure-t-elle avant d’évoquer l’avenir. « Cela me plaît vraiment beaucoup d’écrire, j’espère pouvoir encore explorer ce moyen d’expression-là au cours des prochaines années. »
Thiebaut Colot
N. B. : Pop est disponible dans toutes les bonnes librairies où sur Pop, le premier roman de Sophie Museur – ONLIT Editions
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Crédits photos : Anne De Gelas / DR