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« Il existe à Liège un véritable bouillonnement culturel »

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Clelia, Deva Muse, Nams et Tussy sont les quatre lauréats de La Draft organisée pour Les Ardentes. Avant de se produire au Wallifornia Stadium durant le meilleur festival urbain d’Europe, ces quatre artistes étaient vendredi 17 mai sur la scène du Reflektor.

Kaer est l’une des figures emblématiques de la scène urbaine liégeoise. Avec Starflam, il a écrit l’une des plus belles pages du rap belge. « Starflam, c’est mon nom de famille », glisse-t-il malicieusement. « Ce fut une très belle aventure qui a duré très longtemps. Une telle longévité, notamment avec notre retour en 2014 et jusqu’en 2017, est assez rare dans ce milieu. »

Dans le parcours de ce passionné, la Cité ardente occupe une place centrale. « Liège, c’est la maison, je lui pardonne plus facilement ses travers. J’ai tous mes repères et toutes mes habitudes ici et cette ville offre une vraie facilité de contacts », confie-t-il. « Culturellement, c’est une ville forte, la plus importante de Wallonie. Faute de moyens, bien souvent, les Liégeois en deviennent super créatifs, inventifs, décomplexés. C’est d’ailleurs ce qui nous a forgés, avec Starflam, quand il a fallu concevoir un modèle à partir de rien. Désormais, le style liégeois dans la musique urbaine s’est bien affirmé. » Et d’ajouter : « Il existe à Liège un véritable bouillonnement pour le moment, notamment avec la Milk Tape. On observe aussi un switch de générations avec des jeunes artistes qui prennent leur envol à l’image d’Absolem. Quelque chose est en train de se passer autour de lui. Il devient un moteur du rap belge et un porte-drapeau du rap liégeois. Cela démontre que désormais, après que l’axe bruxellois fut longtemps leader dans le milieu du rap, les artistes liégeois prennent de l’envergure. »

Depuis quelques années, ce souriant quadragénaire a délaissé la scène pour les coulisses. « J’ai désormais davantage de satisfaction à mettre en lumière des artistes », assure celui à qui l’on demande pourtant régulièrement quand il compte reprendre le rap, une discipline qu’il compare au sport, nécessitant un entraînement rigoureux. Chargé de projets à La Centrale Son qui propose du label services, programmateur et curateur pour différents évènements et coach scénique – notamment pour des artistes comme Hamza, Peet et Hatik – reconnu, Kaer est sur tous les fronts et partage son expérience, son vécu et ses compétences auprès de nombreux artistes émergents ou confirmés.

Pour la seconde année consécutive, en partenariat avec Les Ardentes, la SABAM et PlayRight+, Kaer organisait une draft à destination des artistes belges ou résidents en Belgique avec à la clé pour les quatre lauréats une programmation sur la scène du Wallifornia Stadium des Ardentes. « Nous avons reçu 337 candidatures dont 251 qui répondaient aux critères », dévoile ce chantre de la musique urbaine. « J’ai réalisé une analyse approfondie de chaque candidat car je ne sais que trop bien, pour l’avoir vécu avec Starflam, l’importance que cela a quand des artistes remettent leurs rêves dans les mains de quelqu’un. »

Quinze projets furent sélectionnés parmi lesquels quatre se sont particulièrement distingués. « Nous souhaitions le respect d’une parfaite parité de genre ainsi qu’une certaine diversité de styles car la musique urbaine est désormais protéiforme. Elle revêt différents visages, de multiples formes et sensibilités. Cette mutation explique d’ailleurs qu’elle résiste au temps », précise Kaer.

Les lauréats sont Clelia, Deva Muse, Nams et Tussy. « Clelia, une Bruxelloise au parcours atypique, a développé un univers musical éclectique, qui mélange les influences de la pop, du R&B et de l’électro, à la croisée entre Angèle et Stromae. Deva Muse propose une production hyperpop, très mélodique et énergique », présente notre sympathique interlocuteur. « Nams est un jeune artiste originaire du Brabant Wallon qui jouit d’une belle communauté dans le circuit étudiant grâce à son rap mélodique. Tussy, de l’Obi League, a un profil très méritant. Il a énormément bossé sur la sortie de chacun de ses projets en se créant des opportunités, notamment en organisant des tournées dans les écoles. »

Ces quatre artistes étaient réunis vendredi 17 mai au Reflektor pour une soirée totalement gratuite. « Les pluies diluviennes ont engendré le retard de nombreux spectateurs mais l’évènement a rassemblé environ 200 personnes », analyse Kaer. « Le public était ravi de découvrir ces nouveaux artistes qui interprétaient chacun quatre morceaux et l’enthousiasme ressenti est un bon signal quant à notre sélection. »

Clelia, Deva Muse, Nams et Tussy vont prochainement entrer en résidence pour bosser sur leur futur concert aux Ardentes où ils proposeront chacun une prestation de trente minutes. « C’est un énorme challenge pour eux mais c’est très motivant et gratifiant », constate Kaer. « Cela doit les encourager à poursuivre leur cheminement artistique et leur permettre de franchir certaines étapes alors qu’en Belgique, comme le réseau des salles est vite saturé, on peut parfois avoir le sentiment de faire du surplace. » L’histoire est en marche…

Thiebaut Colot

Crédits photos : DR

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