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« Le cinéma, c’est mon mode de vie »

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#Liégeois / Liégeois Magazine vous emmène à la rencontre de Robert Guédiguian, immense réalisateur engagé.

« Le cinéma, c’est mon mode de vie », commence Robert Guédiguian dont le prochain film sortira en France fin janvier. « Le cinéma est un art exigeant et c’est long de faire un film. Il faut écrire, chercher des financements, tout mettre en œuvre pour tourner le film au moyen d’une vraie synergie collective. Le cinéma m’occupe tous les jours, finalement c’est une vie entière consacrée au cinéma. »

En quarante années de carrière, ce cinéaste récompensé à Cannes pour Marius et Jeannette, a réalisé plus d’une vingtaine de films, avec la casquette assumée de réalisateur engagé et populaire. « Mes parents étaient ouvriers à Marseille, mon papa bossait sur les quais et ma maman faisait des ménages », rappelle-t-il. « J’ai toujours voulu donner la parole à ceux qui ne l’ont pas, être le porte-parole des classes populaires trop souvent muettes. Je suis un peu comme ces écrivains publics à l’époque. »

Le réalisateur marseillais l’assure : tous les films sont politiques. « Même quand ils ne veulent pas l’être ou font semblant de ne pas l’être », précise-t-il. « L’art raconte comment vivent les hommes et adopte forcément un point du vue sur le réel. Autant l’assumer et être engagé. Ceux qui le nient sont soit des menteurs, soit des crétins : je ne sais pas ce qui est le pire. »

Mercredi 27 novembre, Robert Guédiguian était à Liège pour participer au festival PolitiK« Les festivals sont importants et nécessaires car ils permettent d’aborder des thématiques, de lancer des débats. Le cinéma est un espace de démocratie », affirme-t-il. « Il faut continuer à insister sur cette idée que le cinéma est un formidable moyen pour questionner et comprendre le monde en traitant une multitude de problématiques. »

L’immense réalisateur, qui jouit d’un public fidèle à l’international, accompagnait la projection de Et la fête continue !, son dernier film sorti il y un an qui a reçu un bel accueil. « Dans ce film, je souhaitais insister sur la nécessité de ne pas renoncer à l’action collective, qui peut prendre des formes diverses et variées », explique Robert Guédiguian. « Il faut trouver des causes à défendre sinon le monde est foutu, vouloir être actif et vouloir avoir du pouvoir grâce à l’action collective. »

Comme pour la majorité de ses œuvres, Robert Guédiguian a tourné Et la fête continue ! à Marseille. « Toutes les histoires du monde peuvent se raconter n’importe où mais pour être universelles, elles doivent s’ancrer dans un lieu particulier », pointe-t-il. « Le monde est le même partout et mes histoires pourraient être situées ailleurs. » Et d’ajouter : « Le cinéma reproduit la réalité de façon plus forte et moins abstraite que d’autres arts. C’est une de ses forces. »

Dans ce film comme dans de nombreux autres, on retrouve les acteurs fétiches de Robert Guédiguian – Jean-Pierre Daroussin et Gérard Maylan – et une équipe qui change peu. « Je ne pensais mais faire ça de manière systématique mais quand j’ai débuté, on fonctionnait comme une troupe. Nous étions tous de la même extraction et faisions des films que nous pensions utiles, nécessaires », dévoile-t-il. « Comme nous avions la même conception du monde, ce procédé est venu assez naturellement. »

Dans Et la fête continue !, on retrouve également, comme à chaque fois ou presque, Ariane Ascaride, la compagne de Robert Guédiguian. « Plus jeune, je ne voulais pas forcément faire du cinéma. Par contre, Ariane a toujours voulu être actrice et c’est peut-être aussi grâce à ça que j’ai embrassé cette carrière », analyse le cinéaste marseillais. « Nos films, comme des films de famille bien plus coûteux, jalonnent notre vie et notre histoire existe aussi peut-être grâce à ce chemin-là. »

À septante ans, Robert Guédiguian n’envisage pas d’arrêter de tourner. « La retraite est une chose étrange pour un artiste », glisse-t-il. « Le cinéma est un art physique et exigeant mais tant que je suis physiquement et intellectuellement en forme, je continuerai de faire des films. »

Nul doute qu’en cette période troublée, où la nuance disparait au profit de celles et ceux qui crient le plus fort, où la haine prend le pas sur la solidarité et la bienveillance et où les dérives autoritaires se multiplient, nous avons plus que jamais besoin de films qui poussent à la réflexion et de cinéastes engagés.

Thiebaut Colot

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Crédits photos : DR

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